Qualité des Millésimes à Bordeaux
Les cartes de millésime tentent de résumer d'un mot (d'une étoile) toutes les caractéristiques d'une année, dans le but louable "d'informer". Mais, fort heureusement, il faut plus de quelques lignes pour définir un millésime.
Nous avons, nous aussi, voulu donner un aperçu des millésimes récents. Ces quelques notes vous aideront à évaluer les bouteilles que vous aborderez. Les grandes années sont idéales pour le vieillissement et les grands moments, les petits millésimes trouvent leur place lors de certains repas de fête ou de travail.
Dernier conseil, oubliez l'adage : "Petit vin dans les grandes années et grand vin dans les petites". En effet, il remonte à une époque révolue où les "petits" n'avaient pas la connaissance pour sauver les "petites" années, il fallait donc les éviter. D'autre part, à notre point de vue, quitte à investir dans une bouteille prestigieuse, autant que ce soit dans un grand millésime, c'est alors seulement que le terroir y est sublimé… il ne faut plus alors regarder à la dépense!
Les bonnes années des Bordeaux rouges sont : 1945, 1947, 1948, 1949, 1950, 1952, 1953, 1955, 1959, 1961, 1962, 1966, 1967, 1970, 1975.
- 1978 Bel automne. Bon millésime, vieillit assez vite.
- 1979 Abondance et Qualité. Plus corsés que les 78.
- 1981 Grand millésime, trop méconnu. Vins concentrés.
- 1982 Grande année, Succès médiatique (justifié)!
- 1983 Beau millésime, vins équilibrés, beaucoup de fruit.
- 1985 Abondance et qualité. Enterrez quelques bouteilles.
- 1986 Bon millésime. Moins de tanins que 1985, bonne garde.
- 1987 Pluies d'automne qui ont juste entamé un superbe potentiel.
- 1988 Bonne maturité, petit volume : Richesse & concentration : Qualité.
- 1989 Grande abondance, très grande qualité (qui a dit incompatible?).
- 1990 Ressemble au millésime 1989, en un peu plus irrégulier.
- 1991 Gelées d'avril dévastatrices, à part ça millésime qui ira très bien!
- 1992 Abondance, des vins légers, harmonieux, à boire.
- 1993 Une année honorable, léger manque de structure.
- 1994 Encore une année moyenne.
- 1995 Grand millésime, le meilleur depuis 1990.
- 1996 Grand millésime (supérieur à 95 dans le médoc)
- 1997 Quelques pluies d’automne en font un vin à apprécier jeune
- 1998 Grand millésime (fort bel équilibre)
- 1999 Grand millésime (trop de rendement chez certains)
- 2000 Très grand millésime (coloré et structuré pour la garde).
- 2001 Très belle maturité. Nombreux très beaux vins ronds et structurés.
- 2002 Une année sympathique, des vins souples qui s'apprécient déjà.
- 2003 L'année de la "Canicule". Des vins riches et concentrés, parfois atypiques, souvent très intéressants.
- 2004 Une récolte très abondante... un millésime "classique", c'est l'été indien Bordelais qui a sauvé la mise.
- 2005 : le plus grand millésime depuis 1982. Pour une fois tous les observateurs sont unanimes pour encenser ce millésime.
- 2006 : Un millésime délicat : juillet a été chaud, août frisquet mais ce sont surtout les pluies de la mi-septembre qui ont compliqué la tâche des vignerons.
- 2007 : un millésime exigeant : les pluies ont été régulières jusqu'au 29 août. Comme les premiers raisins commençaient à mûrir il a fallu faire un sévère tri pour ne garder que les raisins sains. Ensuite septembre et octobre ont été très favorables. Certains ont su en tirer profit. Mais il fallait du métier !
- 2008 : Printemps et été maussade n'ont permis qu'une maturité moyenne. Heureusement, l'été indien s'est installé à la mi-septembre. Pour atteindre une belle maturité il fallait de la patience et avoir bien fait son travail de vigneron tout au long de l'année. Un millésime hétérogène avec de belles réussites tout de même.
- 2009 : Le meilleur millésime depuis 1949. Un bel été. Septembre sec avec une alternance de nuits fraiches et de journées chaudes. Un rêve de vigneron !
- 2010 : Aussi réussi que 2009 !
- 2011 : La sécheresse a été colossale mais les quelques pluies d'août et septembre ont fragilisé des raisins très mûrs. Probablement de beaux vins avec potentiel de garde réduit.
- 2012 : Un printemps maussade a favorisé la coulure (la fleur ne donne pas de fruit) et le mildiou... au final une récolte très réduite (à peine 30hl/ha au Château Rioublanc). Si la qualité est quand-même au rendez-vous c'est grâce au talent des Hommes tant à la vigne qu'au chai.
- 2013 : "Annus horribilis". Les trombes d'eau de juin ont ruiné la floraison du merlot (coulure et millerandage). En plus, le froid à étalé la floraison en rendant la vigne longtemps sensible au mildiou. L'été a été très correct, mais le mal était fait. La pluie est revenue en septembre amenant le botrytis. Ainsi il n'y aura aucune bouteille de Rioublanc rouge 2013 (une première depuis notre 1ère production en 1972). Seuls les blancs secs ont pu donner de jolies bouteilles.
- 2014 : l'été froid a fait craindre le pire. Mais septembre et octobre chauds et secs ont permis la maturité totale de tous les cépages. Un millésime qui se caractérise par une belle fraîcheur. Logiquement, un millésime de grande garde, en rouge comme en blanc.
Pour les Bordeaux blancs secs, tous les millésimes récents sont intéressants. Cela s'explique en partie par le réchauffement climatique qui assure de belles maturités. Mais la raison principale est que la réussite d'un vin blanc dépend surtout du travail du vigneron (à la vigne comme au chai). Les caractéristiques du millésime ont un effet évident sur le caractère du vin blanc, d'une année à l'autre le vin peut être différent... mais peut toujours être réussi (ou pas).
Pour les Bordeaux Liquoreux, laisser vieillir : 1959, 1961, 1967, 1970, 1971, 1975, 1976, 1983, 1985, 1986, 1989, 1990, 1993, 1995, 1996, 1998, 2003, 2007,2009,2010.
Et rappelez-vous, il s'agit de repères, les exceptions sont nombreuses.
Il faut bien comprendre que les facteurs climatiques ne sont qu'un des aspects de la qualité du raisin et donc du vin. Bien sûr, une année particulièrement exécrable donnera difficilement des bouteilles magiques. Mais le plus souvent, quand une bouteille déçoit, on peut craindre un manque d'investissement dans l'élevage de la dite bouteille. Le raisonnement est simple : ce millésime a une mauvaise presse, il sera donc difficile à vendre, on limite donc le coût de son élevage. Triste conséquence : un petit millésime doublé d'un "petit" élevage donnera une petite bouteille. C'est d'autant plus regrettable que tout un chacun a goûté une petite perle issue d'un petit millésime élevé et vieilli avec passion…
En résumé, nous dirons que la réussite d'une bouteille est le fruit du millésime mais aussi :
- du terroir : pas trop riche ni humide pour éviter les vignes “poussantes”. En effet quand la vigne privilégie la pousse du végétal, bien souvent la maturité du raisin est retardée et si le temps ne s’y prête pas empêchée.
- de l'âge de la vigne (jeune elle “pousse” vieille elle soigne son raisin)
- de l'âge du vigneron (son expérience et sa compréhension de la vigne).
- de l'âge du maître de chai (sa connaissance et son expérience du vin)
- de l'investissement dans la vinification et l’'élevage.
- de la qualité de la mise en bouteille et du stockage.
Bien sûr cette liste est longue. Cela serait tellement plus simple si tout ne dépendait que du ciel... Mais ici aussi, à vouloir trop simplifier on trompe le monde quand on ne se trompe pas soi-même...